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vendredi 19 août 2011

Dieudonné à Alger





Dieudonné s'est produit le 21 juillet dernier à Alger où il a interprété l'un de ses spectacles : « Mahmoud ».

Contesté en France et en Belgique où il fut accusé d'antisémitisme, j'ai trouvé là l'occasion de me faire une opinion qui ne serait pas directement induite par les médias.

Dieudonné est dérangeant, c'est incontestable. Il est politiquement incorrect, c'est le moins que l'on puisse dire ! Il a commencé son spectacle en nous rappelant l'impératif de la liberté d'expression et comment lui « artiste libre » on le boycottait parce que porteur d'une certaine vérité, celle qu'il ne faut pas crier très fort. D'ailleurs, sous les acclamations nourries du public, il lança : « la vérité tout le monde s'en fout, c'est le mensonge qui fait tourner le monde ». Il nie être antisémite (personnellement je comprends mal comment il a pu se réveiller un jour antisémite après avoir connu une telle complicité avec Elie Semmoun ! ). Il est antisioniste, le dit et le revendique, ce n'est pas un crime mais il l' affirme avec une telle virulence que ça laisse parfois perplexe. Desproges, en son temps, avait la même forme d'humour, il ne s'est jamais gêné d'évoquer tout à fait librement les juifs 1, les camps de concentration, les féministes, les arabes... Mais c'était les années 80, celles qui succédaient au renouveau sociétal amorcé dans les années septante par le mouvement de mai 68. A l'époque, il était même bien vu d'avoir des opinions dérangeantes, cela prouvait la bonne santé de la liberté d'expression et permettait aux artistes, comédiens, caricaturistes, chanceliers, d'avoir accès à tous les médias.

Chez Dieudonné donc, tout y passa : Les juifs et la Shoah furent ses thèmes de prédilections. Moi qui d'habitude a les zygomatiques plutôt faciles à dérider, j'ai trouvé certaines vannes très limites : « quand on écoute patrick Bruel et Enrico Macias on comprend que les allemands ont eu envie de construire des chambres à gaz »; Même si je ne suis fan ni de Bruel, ni d' Enrico Macias, je me suis sentie très mal à l'aise. Par contre, je partage cette idée de la mémoire sélective de l'Histoire et des historiens concernant les crimes contre l'humanité ( le massacre des indiens d'Amériques, l'esclavagisme, la guerre d'Algérie...). Chez Dieudonné il y a l'art et la manière, c'est la manière qui fait parfois défaut : un juif lui dit : « ma grand-mère est morte dans un camp de concentration après avoir été déportée » il lui répond : « je m'en fout de ta grand-mère, je lui pisse dessus, la mienne est morte sous une bombe au napalm larguée par les français au Cameroun ! ». Voilà le style de Dieudonné, celui d'un ado rebelle qui dénigre la souffrance de l'autre parce que la sienne lui parait plus intense. Il y a beaucoup d'injustices à travers le monde et ce n'est pas en minimisant celle de l'autre que la nôtre gagnera en reconnaissance.

1 - Pierre Desproges évoqua un jour dans l'un de ses sketchs un personnage antisémite qui s'exprima comme suit :


On me dit que des Juifs se sont glissés dans la salle ?

"Vous pouvez rester. N’empêche que. On ne m’ôtera pas de l’idée que, pendant la dernière guerre mondiale, de nombreux juifs ont eu une attitude carrément hostile à l’égard du régime nazi. Il est vrai que les Allemands, de leur côté, cachaient mal une certaine antipathie à l’égard des juifs..."

lundi 8 août 2011

Une étoile filante

Je n'oublierai jamais ces deux grands yeux qui vous transpercent et semblent lire à travers vous. Je revoie cette petite fille qui tout à coup surgissait après la sonnerie d'école, son cartable dans les mains ou sur le dos. Je pense n'avoir jamais vu une petite fille aussi belle et même lorsqu'elle quitta l'école primaire, où je la croisais chaque jour, il m'arrivait de temps en temps de penser à cette princesse blonde au regard surnaturel. Charlotte est devenue une adolescente puis une jeune femme mais la vie n'a pas voulue qu'elle éblouisse plus longtemps les gens qui auraient eu la chance de traverser sa vie. Celui qui s'est donné le droit de lui fermer les yeux définitivement dit regretter, ne pas comprendre pourquoi, soudainement il fut pris de cette pulsion meurtrière. Il dit que la panique, l'alcool, sa force... Il dit ! Je n'ose imaginer l'enfer dans lequel la famille de Charlotte est plongée. Je n'ose imaginer le cataclysme qui depuis une semaine s'est emparé du cœur de sa mère dont le sourire apaisant était une vraie invitation à la discussion en attendant la sortie d'école de nos enfants. Je revoie encore cette femme lorsque je lui disais "elle est belle ta fille !", elle esquissait un sourire timide qui traduisait l'humilité d'une mère qui savait la beauté de sa fille hors norme mais trouvait peut-être inconvenant de le confirmer. A cette mère je dis : Qui a pu croiser Charlotte, ne serait-ce qu'une seule fois dans sa vie, ne peut l'oublier. C'est une triste consolation, ça n'en est même pas une, je le sais. Mais les étoiles filantes sont rares et attirent l'attention bien plus que les autres. Charlotte Antoniewicz morte à quelques jours de ses dix-neuf ans est une étoile filante. Elle est venue, elle est passée mais restera à jamais dans la mémoire de quiconque l'a croisée.